Les amazones – Jim Fergus

Les Amazones, survivantes des Cœurs Vaillants, forment un groupe de femmes guerrières composé de cheyennes et de blanches. Après la bataille de Little Big Horn, elles prennent les armes contre l’État américain, qui usurpe des terres ancestrales et détruit une culture millénaire.

Ces rebelles entrent dans la clandestinité avec d’autres tribus, engageant un combat sans merci qui traversera les générations.

Deux destins entrelacés

Molly raconte son histoire après la bataille de Little Big Horn, qu’elle n’a pas vécue directement. Faite prisonnière par les militaires américains, elle fut sauvée par le leader des Cœurs Vaillants et son mari. Elle retrouve finalement la tribu de Little Wolf, dispersée après le conflit.

May, quant à elle, relate son expérience après la bataille de Rosebud où une balle dans le dos faillit lui coûter la vie. Sauvée par Wind, la femme médecine de Little Wolf, elle connaîtra de longs mois de convalescence. Toutes deux se livreront au vol de chevaux pour survivre, jusqu’à la rencontre avec Chance, qui la soutiendra dans son aventure.

Une structure narrative originale

Le livre s’articule autour des journaux intimes de Molly McGill et May Dodd, retravaillés par Molly Standing Bird. Cette dernière avait déjà transmis les précédents carnets de Suzie et Molly à JW, descendant de May. À travers ces écrits, nous suivons en parallèle l’avancée de leur survie, dans un monde devenu hostile pour leur peuple d’adoption.

Ce troisième et dernier volet de Mille femmes blanches met fin au programme du FBI lancé en 1875. Seules trois femmes de la première équipe ont survécu : Phemie, Martha et May. Par contre, toutes les membres de la seconde équipe ont traversé cette épreuve. Cependant, leurs destins divergent : certaines veulent demeurer parmi les Cheyennes, tandis que d’autres, à l’instar de Lady Ann, souhaitent regagner l’Est.

Un témoignage poignant sur la chute des nations amérindiennes

À travers ces récits, nous assistons à la décadence des tribus amérindiennes après la conquête de l’Ouest. Les terres sont ravagées, les animaux décimés, les enfants, femmes et hommes assassinés. Pourtant, malgré cette tragédie, transparaît la fierté d’un peuple qui voit disparaître un mode de vie ancestral en à peine trois ans.

L’auteur met en lumière plusieurs aspects marquants :

  • La solidarité exceptionnelle entre ces femmes
  • Les relations complexes entre hommes et femmes mais aussi entre Indiens et Blancs
  • Les amours interdits entre personnes de races différentes
  • Les séquelles durables de ces massacres, un siècle plus tard

Des femmes blanches devenues guerrières

Ces femmes blanches, pacifiques à l’origine, ont dû tuer pour se défendre ou protéger leur famille. Après deux années passées au sein des tribus, elles ont adopté un mode de vie simple et se battent désormais pour la cause amérindienne. Elles n’hésitent plus à tuer ceux qui les menacent ou à voler pour subvenir aux besoins des leurs.

Un héritage de violence et de souffrance

Molly Standing Bird révèle une réalité accablante : un siècle après les faits, les Amérindiens ne se sont toujours pas remis de ces massacres et de la spoliation de leurs terres. Beaucoup vivent dans la pauvreté, l’alcoolisme et la violence. Le respect mutuel qui existait autrefois entre hommes et femmes a disparu, remplacé par une misère morale et physique.

Une lecture poignante et actuelle

J’ai dévoré ce troisième tome d’une traite, malgré la lourdeur du sujet. L’histoire résonne étrangement avec notre XXIe siècle, où les puissants continuent d’écraser les plus faibles. Les Blancs, forts de leurs armes, n’ont eu de cesse de manipuler et de mentir pour s’approprier ce qu’ils considéraient comme leur dû, sans égard pour l’humanité des autres.

Une réflexion sur l’identité américaine

Cette lecture m’a aussi fait prendre conscience que les États-Unis se sont construits sur le massacre systématique des peuples autochtones, sans aucun respect pour leurs cultures ou leur environnement (sans oublier l’esclavagisme).

Ironie tragique : ces Américains, souvent eux-mêmes victimes de persécutions dans leur pays d’origine, n’ont fait que reproduire les violences qu’ils avaient subies.

Un hommage nécessaire

Il est regrettable que la culture amérindienne ne soit pas davantage reconnue et respectée. Ces peuples mériteraient réparation pour les souffrances endurées. Leur héritage culturel, leur relation harmonieuse avec la nature et leur sagesse ancestrale constituent un patrimoine précieux que l’Amérique moderne devrait enfin honorer.

Citations

Toutes les religions semblent être organisées au bénéfice du sexe masculin, avec pour conséquence que les femmes sont reléguées au second plan : elles accouchent, élèvent les enfants, s’occupent des corvées. Voilà pourquoi je me méfie des religions, celles des Indiens y compris.

Notre apparence physique … un autre motif qui pousse les colons à exterminer et incarcérer les premiers occupants de ce pays, tout simplement parce qu’ils ne leur ressemblent pas.

Ton peuple a massacré les bisons des plaines. Nous en étions réduits à manger nos chevaux et le bœuf que l’État expédiait dans les réserves. Bien souvent de la viande pourrie, d’ailleurs. C’est à cette époque que nous avons commencé à tomber malades, physiquement et mentalement. Nous avions coexisté avec les bisons pendant plus d’un millénaire. Nous dépendions d’eux pour tout, c’était un véritable mode de vie. Nous les considérions comme nos frères. Pas seulement des frères : nos frères. Ils faisaient partie de la famille.

Partagez

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *